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Les questions courantes sur l’hypnose

La pratique de l’hypnose véhicule bon nombre de représentations, plus ou moins fantasmées.


En répertoriant les réponses aux questions et objections courantes émanant de la pratique de l’hypnose, et en m’appuyant sur le travail d’Erik Pigani (Psychologies. com), loin d’épuiser toutes les ressources de l’hypnothérapie, nous soulignons, surtout, ce qu’elle n’est pas.


Dix questions sur l’hypnose

Ses mécanismes restent un mystère. Mais son efficacité n’est plus mise en doute. Toute la lumière sur une technique ancienne qui revient très fort.

Assisterions-nous au « grand retour » de l’hypnose ? Depuis plusieurs mois, cette technique thérapeutique plus que centenaire semble avoir le vent en poupe : multiplication des livres chez les éditeurs, des forums sur Internet, des conférences, des lettres de nos lecteurs… Sans oublier qu’elle était récemment l’héroïne du film de Benoît Jacquot, Le Septième Ciel. Tout se passe comme si les possibilités de l’hypnose étaient redécouvertes, tant par les thérapeutes, les psychologues et les médecins, que par le public ; et que sa réputation sulfureuse était en train de s’estomper. Voici donc, en dix questions-réponses, l’essentiel de cette pratique qui semble mettre en jeu les capacités les plus étranges de notre cerveau.


Qu’est-ce que l’hypnose ?

Tous les spécialistes ont leur propre définition et aucune théorie ne fait autorité. Le phénomène hypnotique est si complexe que les praticiens disent volontiers qu’il y a, non pas une, mais plusieurs hypnoses. Seule certitude : ce n’est pas un état de sommeil, mais un état modifié de conscience (EMC), comme le rêve, la transe, la relaxation, les expériences mystiques, la méditation…

La « transe hypnotique » correspond à une modification de la vigilance normale – celle qui nous permet de raisonner et de vivre au quotidien. Mais elle a ses caractéristiques : dans un environnement monotone où rien ne se passe, où les stimuli sont peu intenses, notre cerveau est en « manque » d’informations. Il se met alors à en produire lui-même en puisant des images dans notre inconscient. En quelque sorte, on « rêve » tout en restant conscient. En outre, contrairement à l’état de vigilance normale, où l’attention embrasse de nombreux centres d’intérêt en même temps et passe rapidement de l’un à l’autre, elle est concentrée, en hypnose, sur un sujet beaucoup plus restreint. C’est ainsi que, peu à peu, la personne hypnotisée oublie la réalité extérieure pour entrer dans une réalité intérieure, mais qu’elle vivra comme extérieure.

Seule exception : la voix de l’hypnotiseur continue d’être entendue. Ses mots deviennent un stimulus très particulier qui augmente le pouvoir de la suggestion. Celle-ci provoque alors des changements psychologiques ou physiologiques inhabituels (disparition immédiate de douleurs aiguës ou d’un eczéma, etc.). Pourquoi ? Comment ? Cela est encore à ce jour un mystère…


A-t-elle été prouvée scientifiquement ?

Ses effets, oui. De nombreuses études ont montré qu’une suggestion hypnotique entraîne des réponses neuronales. Exemple, celle menée en 1997 par le Pr Stephen Kosslyn, du département de neurologie du Massachusetts General Hospital de Boston : il a présenté à un groupe de seize personnes une palette de couleurs échelonnées et une palette de dégradés de gris. Les réactions de leur cerveau étaient enregistrées par un tomographe à émission de positrons. Lorsque, sous hypnose, on demandait à chacune de ces personnes de « voir » en couleurs la palette de gris, c’était l’aire occipito-pariétale, l’une des zones de reconnaissance des couleurs, qui était activée : le cerveau avait donc réagi comme s’il voyait de la couleur à la place du gris, ce que demandait la suggestion.


Comment se passe une séance ?

« Dormez, je le veux ! » Cette formule légendaire est désormais réservée au music-hall… Pratiquée par un psychothérapeute, l’hypnose est déclenchée de manière progressive. Une séance dure 45 minutes. Allongé (par exemple NDR) sur un divan, le patient ferme les yeux ou fixe un point précis dans la pièce. Assis sur une chaise à côté de lui, le thérapeute l’invite à se détendre. C’est la phase de « préinduction ». Certains professionnels utilisent un équipement sonore qui diffuse une musique apaisante, et parlent dans un micro d’une voix douce et monocorde. Ils proposent au patient de se concentrer sur certaines zones du corps : c’est la phase d’« induction », qui lui permet de fixer son attention sur lui-même. Une somnolence peut s’installer.

Le thérapeute vérifie l’état de la personne en lui demandant de lever une main ou de croiser les doigts. Si elle répond à la demande, c’est qu’elle se trouve bien en état d’hypnose. Ensuite, le thérapeute répète des suggestions, directes (« Votre douleur au bras disparaît ») ou indirectes (« Vous êtes dans un endroit agréable »).

A la fin de la séance, le patient se réveille en douceur au terme d’un compte à rebours, pour retrouver le contrôle de ses muscles et revenir à la réalité sans sensation de malaise. Puis, patient et praticien commentent la séance.

Exemple : un homme vivant mal l’approche de la retraite a retrouvé sous hypnose le souvenir d’autres changements (entrée à l’école primaire ou secondaire, à l’université, mariage, enfants, etc.). Avec le thérapeute, il va analyser ses résistances, mais aussi les bénéfices de ces changements pour construire un « scénario idéal » qui lui permettra d’effectuer une transformation intérieure positive.


Quelles sont les différentes techniques d’hypnose ?

On distingue quatre catégories :

  • Traditionnelle : L’hypnotiseur joue un rôle de premier plan – c’est lui qui dirige la séance. Il prononce des suggestions « directes » (appelées « injonctions »), tandis que le patient reste passif. 

  • Semi-traditionnelle : L’hypnotiseur, toujours au premier plan, émet à la fois des suggestions « directes » et « indirectes ». 

  • Nouvelle : L’accent est mis sur la personne et sur sa relation avec son thérapeute, par des échanges, une communication.

  • Ericksonienne : Le patient participe à sa mise en condition hypnotique. Le thérapeute utilise des métaphores pour que l’inconscient du sujet choisisse lui-même les solutions de ses problèmes.


Tout le monde est-il hypnotisable ?

Selon l’échelle de « suggestibilité hypnotique » mise au point par l’université de Stamford, 5 % d’entre nous sont réfractaires à l’hypnose et 10 % seulement parviennent à entrer rapidement en état d’hypnose profonde. Mais on ignore toujours pourquoi : il n’y a, à ce jour, aucune corrélation démontrée entre la structure de la personnalité et la suggestibilité.


Quels sont ses effets thérapeutiques ?

En France, plus d’un millier de praticiens ont recours à l’hypnose. Dans certains cas, elle constitue le traitement lui-même, dans d’autres, elle facilite l’action du médecin.

Ça marche pour…

  • L’arrêt du tabac : 80 % de taux de réussite. L’hypnose aide aussi à lutter contre les effets du sevrage
  • L’excès de poids et la boulimie : elle exerce un bon rôle de soutien psychologique dans les cures d’amaigrissement.
  • Lutte contre la douleur : elle ne remplace pas l’anesthésie, mais peut la compléter et permettre de diminuer les doses de médicaments. Elle est aussi de plus en plus utilisée en chirurgie dentaire.
  • Les troubles psychologiques : stress, phobies, névroses, anxiété, mais aussi impuissance, frigidité, problèmes de trac, de mémoire, etc.
  • Les troubles digestifs : ulcères, colites ou diarrhées dus au stress.
  • Les maladies psychosomatiques : maladies de la peau (eczéma, psoriasis, etc.), spasmophilie, rhinites à répétition, troubles de la voix et du chant, asthme.

Ça ne marche pas pour…

  • La plupart des troubles psychiatriques graves, comme les dépressions aiguës, la schizophrénie.
  • Le sevrage des drogues dures.
  • Les maladies chroniques graves, telles que le cancer.

 

Tout le monde est-il capable d’hypnotiser ?

Oui. A condition de connaître la technique. Mais certaines personnes sont plus douées que d’autres ... Pour devenir un hypnothérapeute sérieux, il faut avoir fait des études de médecine ou de psychologie, c’est-à-dire être déjà un professionnel de la thérapie. Une formation en hypnose peut ensuite être suivie grâce aux cursus proposés par les associations représentant les diverses « écoles ».


 

Peut-on s’hypnotiser soi-même ?

Oui. En fait, les professionnels affirment aujourd’hui que toute hypnose est une auto-hypnose, le véritable pouvoir de transformation ou de guérison se trouvant dans l’esprit de la personne hypnotisée, et non dans celui de l’hypnotiseur. Il est donc tout à fait possible de s’auto-hypnotiser, mais ce n’est pas un exercice facile. Des guides pratiques et des cassettes audio pourront vous y aider. Dans un premier temps, le plus important est de mettre au point un « rituel » qui va amorcer le processus d’induction (séance tous les jours à la même heure, au même endroit, avec le même type de vêtements, etc.) ; ensuite, d’apprendre à se relaxer. Vous pouvez aussi enregistrer vos propres messages.


 

Le thérapeute influence-t-il inconsciemment le patient ?

Cette question est au centre de débats passionnés. Depuis quelques années, devant l’augmentation faramineuse de cas d’incestes découverts sous hypnose aux Etats-Unis, les spécialistes commencent à parler de «syndrome des faux souvenirs», mettant en cause le rôle de l’hypnothérapeute. Qu’en est-il ? En état hypnotique, on peut se souvenir d’authentiques événements oubliés, voire «refoulés». On peut aussi, en hypnose profonde, voir apparaître des fantasmes comme s’il s’agissait d’événements réels : leur véracité est telle qu’on ne peut les distinguer de vrais souvenirs, car notre cerveau a la possibilité de modifier ou de reconstruire un événement.

Il n’y a donc, à ce jour, aucune réponse définitive ni sur la réalité des souvenirs d’abus sexuels, de «vies antérieures», ou d’enlèvements extraterrestres découverts sous hypnose profonde, ni sur l’influence de l’hypnotiseur par un phénomène de transmission d’inconscient à inconscient, voire télépathique…


 

Peut-il se produire des accidents ?

Non. On se « réveille » toujours, quoi qu’il arrive. D’abord parce qu’on ne dort pas ! Ensuite parce que, si aucune suggestion ne l’entretient, le fonctionnement hypnotique se dissipe de lui-même. Quant à la prétendue influence négative de certains hypnotiseurs, entretenue par le cinéma, elle relève de la légende : aucun hypnotiseur ne peut vous forcer à faire quelque chose qui va à l’encontre de vos valeurs morales. L’hypnose n’est pas un lavage de cerveau ! On ne révèle pas ses secrets les plus intimes si on ne le désire pas… Toutefois, pour éviter les charlatans, adressez-vous à l’une des associations reconnues officiellement pour choisir votre hypnothérapeute.


 

Maladies chroniques. L’hypnose peut-elle les soigner ?

« Certaines, oui. Les acouphènes, par exemple, des bourdonnements d’oreille contre lesquels la médecine reste impuissante. Grâce à l’hypnose, je parviens

à les effacer dans 60 % des cas, car une suggestion peut modifier l’activité des commandes neurobiologiques responsables du fonctionnement de nos organes. Si vous décidez, par exemple, en auto-hypnose, d’augmenter la circulation du sang dans votre pied gauche, les vaisseaux sanguins vont se vasodilater sous l’effet d’une “transduction” (une transmission de l’information aux cellules). L’hypnose permet, c’est certain, d’installer une passerelle entre le corps et l’esprit, et d’activer nos mécanismes d’autoguérison. » Dr Gérard Arcas, médecin et chirurgien ORL, auteur de Guérir le corps par l’hypnose et l’auto-hypnose (Ed. Sand).


 

Stress. Pourquoi l’hypnose est-elle aussi efficace ?

« La gestion du stress est l’une des applications les plus demandées, avec l’antitabac et l’amaigrissement. On le sait, le stress peut engendrer de l’anxiété, des insomnies, et parfois des états dépressifs accompagnés de troubles somatiques. L’hypnose est beaucoup plus efficace que d’autres techniques – comme la “relaxation simple” –, d’abord parce que son effet relaxant, renforcé par la voix et la présence rassurante de l’hypnothérapeute, diminue très rapidement l’impact des agents stressants, quelle qu’en soit l’origine. Ensuite parce qu’elle permet au patient en état hypnotique de lever lui-même ses inhibitions. Par exemple, une jeune femme était tétanisée à l’approche d’un entretien d’embauche important et n’en dormait plus, alors qu’elle savait avoir toutes les chances d’obtenir le poste. En hypnose, elle a “revécu” un précédent entretien où elle avait triché sur son CV et avait été découverte… Nous avons alors ensemble évalué sa peur, et trouvé son seuil adéquat de stimulation/excitation de “bon stress” afin qu’elle puisse considérer cet entretien comme un rite de passage, et non comme un jugement final. »

Jane Turner, présidente de la Société française d’hypnose, psychologue, hypnothérapeute, fondatrice du Dôjô (développement personnel et professionnel).


Source : Erik Pigani